27 avr 2020

The day Alexander McQueen’s catwalk caught fire

Quelques semaines après avoir présenté une première collection haute couture pour Givenchy que la presse fustigea, Alexander McQueen, plein de rage et de ressentiment, livra un des shows pour son propre label parmis les plus sombres de sa carrière. L’intensité au sein de Borough Market fut telle, qu’une voiture prit feu parmi les invités.

 

https://youtu.be/WHbkieHuNno

Nommé en octobre 1996 à la direction artistique de la maison parisienne Givenchy (où il succède à John Galliano), Alexander McQueen présente en janvier 1997 sa première collection couture. Tandis que son prédécesseur se voit acclamé chez Dior, Alexander McQueen est, de son côté, fustigé par la presse. Sa collection inspirée par la Grèce antique laisse le public froid et perplexe, comme le relève le New York Times, qui interroge sa légitimité et son avenir. Blessé, le créateur, qui possède aussi son propre label, se réfugie alors à Londres pour préparer sa collection automne-hiver 1997.

 

C’est à Borough Market, le 27 février 1997 que le créateur va faire sensation. Avant que ce marché couvert ne devienne le temple des hipsters, il fut ce jour-là le théâtre d’un des défilés les plus intenses qu’est connu la Fashion Week londonienne. Dans une ambiance électrique, un décor brut n’offrant pas de sièges et un espace littéralement envahi par les invités, légitimes ou pas, Lee Alexander McQueen présente sa collection “It’s a jungle out there”.  Les mannequins sont grimés, arborant des coiffures gonflées, des bijoux de tête spectaculaires signés Philip Treacy et un maquillage sombre qui les apparente davantage à des animaux qu’à des êtres humains. Leur corps est habillé de cuir, de daim, de peau de vache, parfois même de cheveux, ou encore prisonnier de robes, vestes et trenchs très moulants aux épaules surdimensionnées. La posture, l’attitude, autant que l’atmosphère, est bestiale et agressive…

 

Au départ inspiré par un documentaire où il voit des gazelles chassées par des lions, le créateur – qui n’a pas digéré son humiliation parisienne – faità travers sa scénographie une violente critique de l’industrie de la mode qu’il compare à une jungle. Il déverse sa colère et sa rage au sein d’un défilé dominé par la sauvagerie et la férocité. Le décor apocalyptique se compose de tôles de métal qui semblent trouées par des balles et de vieilles carcasses de voitures, tels les vestiges d’une civilisation humaine, tandis que la musique évoque des animaux africains. Au fur et à mesure que la foule s’installe dans cette sombre dramaturgie, l’ambiance s’échauffe. Quand le défilé commence, subitement, le courant saute. L’intensité du show atteint son paroxysme quand, dans la panique qui s’ensuit, une des voitures prend feu, les décorateurs ayant omis de vider le réservoir d’essence… Malgré l’incident, de ce défilé mémorable, on ne retiendra que des femmes puissantes et dominantes ainsi qu’un créateur à la franchise et à la sensibilité démesurée.