Que faut-il retenir du défilé Marine Serre au Pitti Uomo ?
A Florence, au Pitti Uomo, Marine Serre présentait pour la première fois des créations masculines, et affirmait son éthique de l’upcycling. Celle qui considère que la mode est politique envoyait à notre monde troublé un message de paix et d’amour.
Par Delphine Roche.
Le défilé Marine Serre au Pitti Uomo
“Sempre legati”, toujours liés, tel était le titre poétique du défilé que Marine Serre présentait à Florence dans le cadre du Pitti Uomo. Dans la sublime villa di Maiano, sur les collines de Fiesole, les mannequins s’élançaient depuis la demeure de style néo-Renaissance, à travers les superbes jardins offrant une vue imprenable sur le paysage toscan. Pour accompagner les invités dans ce voyage, la créatrice habituée des podiums parisiens avait fait confectionner dans les ateliers Cuoio di Toscana une couverture de passeport en cuir peinte à l’aérographe de son motif demi-lune signature.
Idyllique, le cadre baigné de la lumière du soleil couchant offrait un écrin à la collection marquée par une élégance très soir. Revisitant la robe de cocktail, la robe sirène, la robe à traîne à l’aune de son audace et de son mordant post-modernes, Marine Serre sublimait la sensualité féminine archétypale sans tomber dans la solennité ou dans la vulgarité. Son travail des matières, et son utilisation continue de l’upcycling, y étaient pour beaucoup. Une robe couture longue en patchwork de denim recyclé, une autre en sacs de tennis, redessinaient radicalement les classiques féminins.
Une collection engagée et éthique
Ailleurs, une parka tout en sacs de randonnée poursuivait cet élan technique et contemporain. Enfin, le message du défilé s’énonçait en toutes lettres et logos sur une spectaculaire robe sirène : blanche comme le drapeau de la paix, elle portait sur le devant le nom “Radical call for love”, faisant référence à la première collection de Marine Serre, née après les attentats parisiens de 2015.
S’y adjoignait un logo de mains liées transformées en ailes – qui a fait ses débuts sur le dernier défilé, présenté en mars de cette année à Ground Control, ancienne friche industrielle transformée en lieu festif – et les drapeaux de la Palestine, du Congo et du Soudan. Ce message fort appuyait l’engagement de la créatrice, et son esthétique évoquant à la fois les luttes politiques et le style urbain – son fameux croissant de lune a été imprimé sur des cagoules protectrices, et la créatrice était présente cette année aux Flammes awards, cérémonie de récompenses des musiques urbaines françaises.
Un défilé entre jeux de transparence et tailoring
Spectaculaires et dignes, justement, des plus belles stars du R’n’B et du rap, des combinaisons en mesh seconde peau flattaient la silhouette féminine, l’une d’elles incorporant des foulards en soie upcyclée, autre signature de la maison. L’effet wow se poursuivait dans une série de silhouettes en cuir upcyclé et peint à l’aérographe : blousons zippés et pantalons pour les hommes, tailleurs jupes ou manteaux à tailles appuyées pour les femmes. Le tout décliné dans des nuances profondes de brun, violet ou carmin, signant une allure sexy et chic évoquant les 70s. S’adressant pour la première fois aux hommes, Marine Serre leur proposait un tailoring relaxé, un style sartorial tout en décontraction, avec vestes légèrement oversize et pantalons fluides.
Inspirée, peut-être, par l’aura romantique de la Toscane, la créatrice concluait son défilé avec une série de pièces blanches façon mariée, sans abandonner son éthique du recyclage, proposant par exemple sous un voile blanc, de la dentelle upcyclée.