Haute Joaillerie : Cartier célèbre les “Beautés du Monde” à travers un fantastique cabinet de curiosités
Pour sa nouvelle collection de haute joaillerie, “Les Beautés du Monde”, la maison Cartier réunissait à Madrid 97 nouvelles pièces d’exception formant un flamboyant cabinet de curiosités. S’y entremêlent formes et couleurs inspirées par les merveilles de la nature – des animaux les plus spectaculaires aux galaxies les plus lointaines – et de la culture. En invitant dans ses créations toutes les civilisations (de l’Europe à l’Asie en passant par l’Amérique du Sud), le joaillier français célèbre un art universaliste nourri par la curiosité pour l’Autre et la célébration de la diversité. “Beautés du Monde” impressionne, par ailleurs, par sa puissance artistique tant les ateliers semblent y avoir trouvé un terrain de jeu propice à l’inventivité (les bagues y sont particulièrement remarquables). Ce plaisir de la création – généreux – y resplendit à travers un expressionnisme doux et joyeux.
Par Thibaut Wychowanok.
“Beautés du Monde”, la nouvelle collection de Cartier, se présente donc comme un fabuleux cabinet de curiosités mêlant recherche scientifique, érudition, nature et cultures – lieu réunissant, pour le pur plaisir de la de contemplation, des objets d’origines différentes et sans relations apparentes. Ces objets prennent ici la forme de colliers, bagues, boucles d’oreilles et broches inspirés par la beauté d’un animal – parfois imaginaire –, d’un végétal, d’une galaxie, d’un paysage ou d’un textile. Cartier semble avoir à cœur de rendre sensible ce moment où l’œil – et l’esprit – est soudainement émerveillé par un élément du monde, du plus petit détail (la beauté d’un nœud de kimono japonais avec la parure “Nishin”) à la plus grandiose réalisation de la Nature. La maison observe tout, avec bienveillance, et dialogue avec les cultures. Chaque pièce forme ainsi l’instantané d’un regard sur le monde, singulier et subjectif comme celui d’un artiste. Une invitation à augmenter le réel de nouveaux territoires qui, loin de se contenter d’inventorier le monde existant, s’imposent comme une exploration de l’hybridité et de l’imagination.
Une rivière de corail s’enroule autour du cou, environnée de sublimes alluvions qui ne sont rien d’autre qu’émeraudes, améthystes et diamants. Il s’agit du collier “Récif”, rythmé par le contraste chromatique emblématique de Cartier entre l’orange du corail et du vert de l’émeraude. Le mouvement de l’eau et de la vie est à nouveau à l’honneur avec “Poroca et son imposant saphir dont la forme originale a inspiré au designer une onde de petits saphirs et diamants, qui se répercutent, depuis la pierre centrale, telles des vagues éblouissantes. De ce monde aquatique émerge un poisson-lune dont les écailles, stylisées par le joaillier, prennent vie avec le collier “Totara” d’une souplesse extraordinaire. Le miracle de la naissance d’un nénuphar est capturé par le collier “Nouchali” et son architecture aérienne, qui évoque tout autant la rosace d’un vitrail. La fleur flottante, posée sur un sautoir de boules de calcédoine, a pour centre une rubellite, autour de laquelle se cristallisent des pétales de diamants cernés d’onyx. Une explosion de formes géométriques, emblématiques de la haute joaillerie Cartier, sublime l’épanouissement de la fleur aquatique, encore renforcé par l’emploi du serti en tremblant qui fait vibrer les pétales au moindre mouvement.
Le monde animal, comme à son habitude, inspire à Cartier des pièces maîtresses. Le collier “Iwana”, abstraction éclatante d’un iguane, a été imaginé à partir d’un lot exceptionnel d’émeraudes de Colombie. Car les créations de la maison française s’initient toujours à partir des pierres, à l’instar du collier “Tepoz” évoquant des flèches amérindiennes, qui doit tout à son lot de rubis aux formes arrondies si particulières. Ou encore la bague “Mahavai” imaginée à partir d’un rare diamant vert (de teinte bleutée) répondant merveilleusement à un diamant bleu dans un toi et moi ultra contemporain. “Beautés du Monde” est exceptionnelle à bien des égards, le moindre n’étant pas la présence de deux diamants verts au sein de la collection !
Une collection tout en douceur, comme en témoigne le collier “Rituel”, hommage aux parures traditionnelles méso-américaines décliné dans un rose et bleu délicat, tendrement cerné de contours noirs intenses d’onyx. Un double rang azuréen de boules de calcédoine y embrasse une constellation de rubis et de diamants suspendus par une monture invisible. Pour cette présentation madrilène, Cartier dévoilait d’ailleurs à ses invités le chef-d’œuvre iconique et symbole éclatant de la flexibilité, de la souplesse et de la somptuosité des pièces de la maison : le fameux collier “Serpent” créé en 1968 pour l’actrice Maria Félix. L’extravagante Mexicaine commande alors cette œuvre d’art unique, en forme de serpent de 57 cm de long, dotée d’une structure entièrement articulée et pavée de 2473 diamants. La pièce, comme une seconde peau, se love autour du cou et ondule à la surface de la peau avec autant d’agilité que l’animal. Le collier “Nitescence” témoigne de façon contemporaine de ce savoir-faire, avec sa dentelle de diamants dont la structure en métal est invisible. C’est que l’œil est sans doute aveuglé par le diamant central de 15 carats DIF, c’est-à-dire d’une extrême pureté et beauté. Dans une autre tradition chère à Cartier, la pièce est transformable : le diamant central du collier peut se porter en bague, et une partie du collier se métamorphose en diadème pour que ses côtés se transforment en bracelets… Souple comme un battement d’aile, le collier “Apatura” suggère quant à lui une aile de papillon avec son déploiement de couleurs chatoyantes, dans lequel Cartier confirme son rang de grand coloriste. Cette pièce peut également se transformer, la seconde partie pouvant se porter en broche.
De ce voyage dans le monde de l’infiniment petit et de l’infiniment grand, on retiendra particulièrement trois destinations. Les bagues en sont une avec leur exceptionnelle inventivité et beauté. À elles seules, elles forment le cabinet de curiosités idéal de Cartier. C’est en effet un œil de dragon qui inspire la sublime “Mizuchi”, qui se distingue par sa magnifique tourmaline et son travail précis et si délicat de l’onyx – pour la première fois travaillé dans des formes de filets noirs si fines et si complexes. La “Tilasm” forme quant à elle un cosmos de galaxies tournoyantes entremêlant diamants et saphirs, alors que la “Viridia” magnifie avec ses formes architecturées son diamant vert de 1,25 carats (le deuxième qui figure dans la collection). L’incroyable réinterprétation du pelage ocellé de la panthère Cartier sur le collier “Panthère Erindi” forme une seconde destination immanquable. Le collier en cristal de roche a été délicatement creusé pour y insérer l’onyx qui forme les taches de la panthère. Une véritable prouesse de lapidaire. Repolie, la matière semble être née ainsi. On n’oubliera pas, enfin, le renversant “Jelliz” réussissant à convoquer les références Arts déco propres à la maison avec des influences technologiques voire cyberpunk, aussi osées que réussies, impertinentes qu’exceptionnelles, à l’image de la collection.
L’incroyable réinterprétation du moucheté de la panthère Cartier sur le collier “Panthère Erindi“ est une seconde destination immanquable. La parue en cristal de roche a été délicatement creusé pour insérer l’onyx qui forme les tâches de la panthère. Une véritable prouesse de travail de lapidaire. Repolie, la matière semble être née ainsi. On n’oubliera pas, enfin, le renversant “Jelliz” réussissant à convoquer les références Arts déco propres à la maison avec des influences technologiques voire cyberpunk, aussi osées que réussies, impertinentes qu’exceptionnelles, à l’image de la collection.