Rencontre avec Halsey, pop star hédoniste et engagée

“Tout ce que j’ose espérer, c’est que ma musique trouve une âme dans laquelle se nicher”, clamait en début d’année le phénomène pop Halsey, sur Twitter. Ce n’est pas une mais des millions d’âmes que Ashley Nicolette Frangipane (de son vrai nom) a réussi à toucher avec sa musique multi-récompensée mêlant hip hop, rock, électro et pop, ainsi qu’à travers ses nombreux combats. L’autrice, compositrice et interprète américaine a sorti cette année un troisième album très personnel, Manic, qui évoque son trouble bipolaire et une rupture douloureuse avec le rappeur G-Eazy. Mais dans sa vie, Halsey est également une artiste engagée. Née d’un père afro-américain et d’une mère italienne, irlandaise et hongroise, la jeune femme a fondé une plateforme pour soutenir les créateurs noirs (The Black Creators Fund) et prend également la parole sur des sujets comme la prévention sur le suicide, les agressions sexuelles et l’homophobie. À la rentrée, l’artiste au look anticonformiste, qui possède également des talents de peintre, sortira un recueil de poésie intitulé I Would Leave Me If I Could sur l’amour, la sexualité et la santé mentale. En attendant, l’Américaine devient la nouvelle égérie de crème glacée dans une campagne Magnum aux côtés de Kiddy Smile, après Bella Hadid et Iris Apfel. Une nouvelle occasion pour elle de transmettre son message célébrant la liberté d’être soi.

 

Numéro : Le message de la nouvelle campagne Magnum est d’être fidèle au plaisir (#truetopleasure). Qu’est-ce ça signifie pour toi ?

Halsey : Je définis et expérimente le plaisir de différentes manières. Pendant le confinement, ma perception et mon expérience du plaisir ont fini par signifier passer du temps calmement à la maison avec mon chien, faire pousser des légumes dans mon jardin et les cuisiner ensuite. Et aussi trouver de nouvelles façons d’expérimenter dans le storytelling.

 

 

“J’essaie toujours d’être aussi ouverte que possible avec mes fans sur ce que je pense, ressens et traverse”

 

 

Comment as-tu réussi à rester toi-même dans le milieu de la musique, tout en enchaînant les disques de platine ?

J’ai eu beaucoup de chance d’avoir des fans qui m’aimaient pour ce que j’étais, bien avant que j’aie une grosse chanson à la radio ou quoi que ce soit d’autre de classiquement défini comme un “succès” dans l’industrie musicale. Mes fans, ainsi que mes amis et ma famille ont été précieux pour me garder enracinée et fidèle à qui je suis en me rappelant constamment que ce que je suis suffit.

 

Manic, ton troisième album, est très authentique dans sa manière de parler de choses personnelles (comme la santé mentale). C’était important pour toi d’évoquer des sujets parfois difficile et d’ouvrir un dialogue à ce sujet avec ton public ?

Absolument. J’essaie toujours d’être aussi ouverte que possible avec mes fans sur ce que je pense, ressens et traverse. Beaucoup de choses auxquelles je fais face dans ma vie personnelle ne sont pas liées au fait d’être une pop star. La plupart du temps, je suis une personne normale avec des problèmes et des frustrations normales et si parler de ces choses dans ma musique peut aider quelqu’un à se sentir moins seul, je veux continuer à le faire pour toujours.

Tu es une activiste. Penses-tu que, surtout en ces temps incertains, le rôle d’un artiste est plus que jamais de se battre pour des causes importantes ? 

L’activisme a toujours été un élément central de mon identité. C’est quelque chose que j’ai mis au premier plan de mon image publique depuis le début de ma carrière et je continuerai de le faire. Les causes peuvent être en constante évolution, mais l’intention est la même. J’ai la chance d’avoir un public et une plate-forme énorme pour pouvoir l’utiliser afin de sensibiliser les autres, ce qui est très important pour moi.

 

 

“L’activisme a toujours été un élément central de mon identité.”

 

 

Quel rôle jouent les réseaux sociaux dans ton engagement ?

Comme pour tous les autres aspects des médias sociaux, il y a des avantages et des inconvénients à les utiliser dans le cadre de l’activisme. Le bon côté, c’est qu’il s’agit d’un moyen très rapide et efficace de diffuser des informations importantes, mais malheureusement, il est également très facile pour les gens de diffuser de la désinformation. J’utilise les médias sociaux pour l’activisme, la collecte de fonds et la sensibilisation, mais je participe également hors ligne à des manifestations et des marches dès que je le peux (En 2017, lors de la Women’s March, Halsey donnait 100 000 dollars à l’association de planning familial Planned Parenthood. L’année suivante, lors du même événement, elle donnait un discours devant 200 000 manifestants pour raconter, sous la forme d’un poème, les agressions sexuelles qu’elle avait subies. Elle appelait alors « les Noirs, les Asiatiques, les pauvres, les riches, les trans, les cis, les musulmans, les chrétiens victimes d’agression sexuelle à s’écouter et à se soutenir les uns les autres, ndr).

 

Tu es considérée comme une icône d’empowerment pour beaucoup de personnes. Qui a joué ce rôle pour toi ?

Alanis Morissette. Et j’ai eu la chance de l’avoir sur mon dernier album (sur le titre Alanis’ Interlude qui détourne le male gaze pour parler de manière très juste d’homosexualité féminine). Elle m’a appris que la colère était toujours une émotion précieuse qui peut être exploitée de manière créative et, surtout, d’une manière qui guérit.

 

Halsey, Manic, disponible depuis janvier 2020 chez Capitol Records.