Hommage: Krzysztof Penderecki, compositeur de L’Exorciste et Shining
“Shining”, “Shutter Island” ou encore “L’Exorciste”, tous ces thrillers portent en leur coeur la musique angoissante de Krzysztof Penderecki, lauréat de quatre Grammy Awards, qui s’est éteint le 29 mars à l’âge de 86 ans.
Par Camille Moulin.
Comme des ongles griffant lentement un tableau noir, la musique du compositeur polonais Krzysztof Penderecki réveille les angoisses les plus enfouies. Figure de l’avant-garde, il s’est éteint le 29 mars à l’âge de 86 ans dans sa ville natale de Cracovie. Révélé à seulement 25 ans en remportant les trois Premiers Prix du Concours de composition de Varsovie, il atteint une renommée mondiale un an plus tard en 1960, en composant Thrène à la mémoire des victimes d’Hiroshima. D’Essen à Hollywood, sa carrière internationale sera couronnée de quatre Grammy Awards (en 1988, en 1999 – dans deux catégories – et en 2017).
Pionnier de la musique atonale aux sonorités crispantes et suraiguës, où les cordes se mêlent à des objets métalliques (tôle ou scie), Krzysztof Penderecki a conquis Hollywood. Shining, Shutter Island ou encore L’Exorciste, les plus grands thrillers sont encadrés de cette musique en apparence dissonante, accompagnant des performances troublantes. Plus surprenant, le compositeur se cache également derrière la musique de films plus légers, à l'image de Je t'aime, je t'aime, d'Alain Resnais.
D’une musique sérielle et atonale, le compositeur évolue peu à peu, abandonnant l’avant-garde et renouant avec une musique post-romantique, profondément marquée par sa foi catholique. Pourtant, cela ne l’empêche pas de collaborer avec le guitariste de Radiohead, Jonny Greenwood qui revisite sa Thrène en l’honneur des victimes d’Hiroshima ainsi qu’une autre composition, Polymorphia (musique figurant dans la bande originale de L’Exorciste), en 2012.
Au-delà du cinéma, le compositeur joue aussi un rôle politique important en Pologne, dans les mouvements d’opposition des années 80 : le Solidarność, syndicat mené par Lech Wałęsa, lui passe commande d’un morceau destiné à commémorer les ouvriers tués lors d’une révolte sur les chantiers navals de Gdansk. Lacrimosa naît ainsi dans l’imagination du compositeur et sera plus tard intégrée à son Requiem Polonais.