Hommage à Françoise Hardy, icône mélancolique de la musique et de la mode
L’iconique chanteuse Françoise Hardy, qui se battait depuis 2004 contre le cancer, nous a quittés le 11 juin 2024 à l’âge de 80 ans, comme l’a annoncé son fils Thomas Dutronc sur les réseaux sociaux. Numéro rend hommage à l’idole des filles solitaires et romantiques.
par Violaine Schütz.
« On est bien peu de chose / Et mon amie la rose / Me l’a dit ce matin / Vois le dieu qui m’a faite / Me fait courber la tête / Et je sens que je tombe / Et je sens que je tombe / Mon cÅ“ur est presque nu / J’ai le pied dans la tombe / Déjà je ne suis plus. » En 1964, Françoise Hardy chantait déjà la fin avec beaucoup de grâce et de poésie dans l’émouvante chanson Mon amie la rose.
Notre hommage à Françoise Hardy, icône de la chanson et de la mode
Mais ces lignes : « Tu m’admirais hier / Et je serai poussière / Pour toujours demain » n’étaient, elles, pas prophétiques. Encore admirée et inspirant une nouvelle génération de chanteuses (Clara Luciani) et des groupes de pop et de rock (dont Blur avec qui elle fera un duo), Françoise Hardy n’a jamais cessé d’être une icône, jusqu’à ce qu’elle nous quitte vraiment, ce 11 juin 2024. Et ce, malgré des opinions politiques clivantes avec lesquelles on ne sera pas d’accord.
Autrice, interprète et compositrice de talent, la solitaire et réservée Françoise Hardy laisse derrière elle 28 albums, des films, des vidéos évanescentes, des paroles de chansons (parfois écrites par Patrick Modiano) et de nombreuses images – souvent signées par son ex-compagnon Jean-Marie Périer – qu’on n’ pas fini d’épingler sur ses comptes Pinterest. Et dans nos cÅ“urs.
Musicalement, elle a offert aux mélomanes et aux anxieux de nombreux hymnes mélancoliques et nostalgiques évoquant souvent des amours contrariées : Tous les garçons et les filles, La maison où j’ai grandi, Le Temps de l’amour, L’Amitié, Message personnel, Comment te dire adieu et bien d’autres. Françoise Hardy, continuellement angoissée et très timide, chantait pour les filles qu’on n’invitait pas à danser aux boums. Pour celles qui s’enfermaient aux toilettes lors des mondanités. C’est ce que la chanteuse ultra sensible faisait : au temps des fêtes yéyé, elle se cloîtrait dans la salle de bain de l’appartement où se déroulait la bacchanale pour jouer de la guitare, assise sur une baignoire.
Née en 1944 dans un Paris occupé, Françoise Hardy a souffert de l’absence de son père, qui était entré dans la Résistance avant d’être déporté à Dachau durant la guerre. L’homme ne reconnaîtra sa fille que bien plus tard, ce qui expliqua en partie la personnalité farouche, tourmentée et complexée de l’idole yéyé.
Une icône de mode vêtue en André Courrèges, Yves Saint Laurent et Paco Rabanne qui inspire encore
La longiligne et élégante femme de Jacques Dutronc (dont les infidélités la blesseront) a aussi été une icône de mode avant-gardiste. Avec son style androgyne, sa frange épaisse, ses Chelsea boots, ses lunettes futuristes, ses looks André Courrèges, Marc Bohan et Yves Saint Laurent et ses coups d’éclat (manteau en fourrure, moto, mini jupe, trench en vinyl jaune), elle a imposé une silhouette qui fascinait jusqu’à l’étranger. Mick Jagger (qui la considérait comme la femme idéale) et Bob Dylan (qui lui écrivait des lettres d’amour) étaient très sensibles à sa beauté qui se fichait des codes du genre.
Avant que Zendaya ne fasse sensation avec sa tenue métallique Mugler pour l’avant-première de Dune, deuxième partie, Françoise Hardy avait arboré un look façonné par Paco Rabanne impressionnant. Le créateur l’avait en effet habillée d’une robe en maille d’acier de 38 kg. Une armure qu’elle porta sur scène en 1968 et avec laquelle elle ne pouvait pas bouger.
Pour prendre la mesure de l’influence de la star de la chanson française dans la mode, il suffira de rappeler que le label Comme des garçons a été inspiré par sa chanson Tous les garçons et les filles.
Françoise Hardy, une chanteuse discrète passionnée par l’astrologie
Depuis 2004, Françoise Hardy, discrète dans la vie publique, se battait contre le cancer et n’entendait plus d’une oreille. Elle se passionnait surtout pour l’astrologie, dans laquelle elle trouvait un grand psychologique. En 2019, suite à un article que je publiais dans le magazine Elle, la chanteuse m’écrivait un long message pour me faire part de son point de vue. « Contrairement à ce que j’ai lu dans votre article sur l’astrologie, expliquait-elle, sachez que celle que je pratique n’a rien de mystique et ne doit rien non plus aux « messages du ciel », encore moins aux élucubrations de Mme Irma. L’astrologie à laquelle j’adhère n’a rien d’irrationnel. Elle se fonde sur les réalités très concrètes du système solaire, un tout dont notre planète terre est indissociable. Elle repose sur les cycles des planètes et du soleil, ainsi que sur les rythmes spécifiques à chaque signe du zodiaque.«
Suite à un échange épistolaire, elle finissait par ces mots : « Tant mieux si vous aimez mes chansons – si différentes des morceaux de Daft Punk (la chanteuse avait eu la curiosité de se renseigner à mon sujet, découvrant que j’avais écrit des livres sur ce groupe, ndlr). Vive l’éclectisme et bonne soirée ! » Après son prénom, un trèfle à quatre feuilles apparaissait en guise de signature et symbole de paix.
Il n’y a pas de bonne manière de dire adieu. Mais Françoise Hardy, qui avait demandé au président de la République de faire preuve d’empathie en permettant aux Français malades d’avoir recours à l’euthanasie, est restée une femme digne et de conviction toute sa vie. De celles qu’on n’oublie pas une fois le transistor éteint.