Mostra de Venise 2023 : lassant ou captivant, que vaut The Killer de David Fincher ?
Présenté à la la 80e Mostra de Venise 2023, en compétition, avec toute l’excitation qui entoure désormais le cinéaste, le film The Killer de David Fincher nous plonge dans la psyché tourmentée d’un tueur à gages, joué par Michael Fassbender. Mais que faut-il penser de ce long-métrage qui sera diffusé en novembre sur Netflix ?
par Olivier Joyard.
David Fincher applaudi à la Mostra de Venise 2023
Les films de David Fincher sont souvent aussi attendus que difficiles à agripper. On les reçoit en plein visage mais ils se déploient aussi de façon plus subtile, et il faut du temps pour les disséquer intérieurement. The Killer, présenté à la 80e Mostra de Venise en compétition avec tous les honneurs et les hourras qui entourent désormais le cinéaste sexagénaire, n’est pas le plus grand film de David Fincher – son chef d’œuvre de ces dernières années reste la série Mindhunter. Mais cela ne veut pas dire qu’il faudrait s’en détourner, tant il creuse les thèmes de prédilection de l’auteur de Zodiac, en s’offrant de manière à la fois frontale et détournée. C’est donc, comme dans Fight Club par exemple, l’histoire d’un homme en proie à sa propre violence et à sa solitude.
David Fincher s’approprie un monde imaginé par d’autres, l’auteur Matz et le dessinateur Luc Jacamon, responsables du roman graphique dont le film est adapté. Le récit ultra linéaire suit les péripéties d’un tueur à gages entre Paris, la Nouvelle-Orléans, La République Dominicaine ou encore Chicago. Cet homme sans nom est observé par Fincher dans son quotidien à la fois plat et peu banal. Une bonne partie du film consiste à regarder Michael Fassbender, qui incarne ce héros placide, attendre que sa cible veuille bien se manifester. Il observe, prépare son fusil longue portée, réalise des exercices de yoga, s’habille, se déshabille, parle dans sa tête à laquelle nous sommes en quelque sorte connectés par la voix-off, quand un jour, un dérapage a lieu. Ce héros impassible délaisse alors sa froideur professionnelle pour régler un compte. Même s’il refuse de l’avouer. Même s’il ne s’en rend pas forcément compte.
Tueur à gages, obsession du détail erreurs fatales : que vaut le film The Killer de David Fincher ?
Il faut beaucoup aimer Michael Fassbender pour adorer The Killer, tant l’acteur de Shame occupe la majorité des plans, visage fermé, corps tendu, comme un genre de robot dont le cinéaste saisit les potentialités inquiétantes. Le film déroule ce programme avec une régularité parfois lassante dans sa froideur programmée, jusqu’à une dernière demi-heure où un cœur se met à battre, à travers une superbe scène de bataille à mains nues et une confrontation avec Tilda Swinton en guest star luxueuse, magistrale de tension. The Killer ressemble à un film obsessionnel sur un obsessionnel, l’œuvre d’un maniaque du détail qui filme un autre maniaque du détail et dont le drame (et la libération ?) serait de commettre des erreurs. On ne pourra jamais accuser David Fincher de ne pas savoir de quoi il parle : à chaque film, il s’expose.
The Killer (2023) de Davind Fincher, disponible sur Netflix le 10 novembre 2023.