28 avr 2020

Les 5 vies de Mathieu Amalric

À l’affiche de la mini-série d’Arte “L’Agent immobilier” (à partir du 7 mai sur la chaîne franco-allemande), de la dernière saison du “Bureau des Légendes” et du nouveau film évènement de Wes Anderson “The French Dispatch”, l’actualité cinématographique de Mathieu Amalric est particulièrement riche. Solidaire de Roman Polanski, il a récemment tourné dans le très controversé “J’accuse” et s’est illustré en tant que mécanicien dans le très beau film de Pierre Creton “Le Bel Été”. Retour sur 5 moments de cinéma qui ont façonné la carrière brillante de l’acteur. 

Mathieu Amalric et Marion Cotillard dans “Les Fantômes d’Ismaël” (2017) – Arnaud Desplechin

En 2007 sortait Le Scaphandre et le Papillon, de Julien Schnabel. Un moment de cinéma qui, surement, en aura marqué plus d’un. Paralysé, le visage difforme, Mathieu Amalric y livre son jeu le plus physique, son seul dialogue ne pouvant passer que par un clignement de la paupière gauche. A cette époque, la carrière de l’acteur est déjà forte de plusieurs grands rôles ou apparitions remarquées. Chez André Téchiné (Alice et Martin), Olivier Assayas (Fin août, début septembre), Benoît Jacquot (La Fausse Suivante), Sofia Coppola (Marie Antoinette) ou même Steven Spielberg (Munich), le Français intrigue les cinéastes par son allure d’intellectuel fauché, rehaussée de deux yeux atypiques animant l’écran comme peu d’autres. Rythmé par des collaborations répétées avec Raoul Ruiz, les Frères Larieu, Roman Polanski ou encore Arnaud Desplechin, le parcours international de Mathieu Amalric le hisse au rang des acteurs les plus prolifiques de sa génération. 

1. Comment je me suis disputé… (ma vie sexuelle) (1996) : le rôle d'une vie

 

Les admirateurs de Mathieu Amalric connaissent avant tout ce dernier sous le nom de Paul Dédalus. Personnage à la limite de l’alter ego d’Arnaud Desplechin, Paul Dédalus naît avec Comment je me suis disputé… (ma vie sexuelle) et apparaît régulièrement dans les films du cinéaste (Un Conte de Noël et Trois Souvenirs de ma jeunesse notamment). Alors qu’ils ont déjà tourné ensemble le moyen-métrage La Sentinelle en 1992, le réalisateur et le comédien scellent le début d’une longue liste de collaborations (sept au total) avec ce film qui révèle Mathieu Amalric aux yeux du grand public. Plus que cela, Comment je me suis disputé…(ma vie sexuelle) façonne l’image d’intellectuel torturé et d’éternel séducteur qui accompagne l’acteur encore aujourd’hui. Si le film est avant tout une belle illustration de l’amitié et du désir amoureux, il est aussi à l’origine de deux duos mythiques de cinéma, à savoir le couple Mathieu Amalric/Emmanuelle Devos et le couple Mathieu Amalric/Jeanne Balibar (qui deviendra d’ailleurs sa femme par la suite). 

2. Quantum of Solace (2008) : un grand méchant à la conquête du monde

 

Avec Michael Lonsdale, Carole Bouquet, Sophie Marceau et Léa Seydoux, Mathieu Amalric fait partie des quelques acteurs français qui ont eu un rôle marquant dans un James Bond. Dans la peau de Dominic Greene, il incarne un “méchant” qui cherche à spéculer sur le réchauffement climatique et n’hésite pas à sacrifier sa compagne au profit de son organisation. Déjà révélé à l’international par son rôle dans le Scaphandre et le Papillon (2007) et dans le film de Steven Spielberg Munich (2005), Mathieu Amalric renforce avec ce rôle sa capacité à jouer en anglais, ce qui lui vaudra par la suite de tourner aux Etats-Unis avec David Cronenberg (Cosmopolis), Wes Anderson (The Grand Budapest Hotel, The French Dispatch) ou encore Darius Marder (Sound of Metal)

3. Tournée (2010) : quand l'acteur revêt plusieurs casquettes

 

Très tôt dans sa carrière, Mathieu Amalric s’essaie aussi à la réalisation. De Mange ta soupe (1997), à Barbara (2017), son dernier film en date, ses productions révèlent sa propre personnalité, dessinée ici à travers plusieurs récits, en partie autobiographiques, dans lesquels Jeanne Balibar s’invite régulièrement. Pour son quatrième long-métrage en tant que réalisateur, Mathieu Amalric opère à la fois devant et derrière la caméra. Entouré de danseuses de cabaret de style new burlesque, il y incarne un impresario fauché en pleine tournée en France. Sous la forme d’un road-movie typiquement américain, le film dévoile une poignée de personnages féminins attachants, tandis que l’acteur y révèle avec brio un petit penchant narcissique. En avril 2019, on apprenaît notamment que Mathieu Amalric devrait bientôt sortir Serre moins fort, son huitième film en tant que réalisateur, coproduit par Arte. 

4. La Vénus à la fourrure (2013) : quand le théâtre s'invite au cinéma

 

Adapté de la pièce de David Ives, elle même inspirée du roman érotique de Sacher-Masoch, La Vénus à la Fourrure de Roman Polanski célèbre la frontière parfois ténue entre cinéma et théâtre. Mathieu Amalric y est un metteur en scène (torturé, encore), à la recherche de la comédienne parfaite pour interpréter Wanda, l’héroïne de sa pièce. En duo avec Emmanuelle Seigner, l’acteur illumine ce huis-clôt étouffant, empli de magie et de fessées sadomasochistes. Tourné au sein du théâtre Récamier, le film explore la scène comme décor de cinéma, le texte théâtral comme lignes de dialogues cinématographiques. Ce dispositif audacieux n’est pas sans rappeler celui de La Fausse Suivante de Benoît Jacquot, où Matthieu Amalric donnait la réplique à Isabelle Huppert. Il montre notamment le talent de l'acteur qui, parmi ses nombreuses casquettes, est régulièrement comédien pour des metteurs en scènes comme Stephanie Clau ou Laurent Roth.

5. Le Bureau des Légendes (2015-2020) : une entrée brillante dans l'univers de la série

 

Alors que la saison 5 du Bureau des Légendes est en ce moment diffusée en clair sur Canal +, on peut y retrouver Matthieu Amalric dans le rôle de JJA, un bureaucrate au bord de la psychose. L’acteur a intégré la géniale série en cours de route, à partir de la quatrième saison. Dans le paysage survolté du monde des agents de la DGSE, peuplé par Mathieu Kassovitz, Jean-Pierre Darroussin, Léa Drücker, Louis Garrel, Sara Giraudeau et Florence Loiret-Caille, l’acteur revêt une fois encore un rôle glacial et acerbe qui se fond parfaitement dans l'atmosphère tendu des services secrets.

 

 

L'Agent immobilier, une mini-série des Israëliens Etgar Keret et Shira Geffen. A partir du 7 mai sur Arte.