La vraie histoire du Monopoly… et autres jeux de société
Entre guerres de droits d'auteurs et histoires de mafieux, la naissance des célèbres jeux de société a parfois eu lieu dans des circonstances troubles. Découvrez les mystérieuses coulisses de fabrication de trois jeux célébrissimes : Monopoly, Loup-Garou et Cluedo.
Par Camille Moulin.
Jeter le plateau à travers le salon parce qu’un cousin a eu l’audace d’acheter la rue de la Paix que l’on convoitait depuis trois tours au Monopoly, entrer dans une colère noire dès que l'on reçoit un +4 au UNO… Chaque famille ou groupe d'amis a connu ces sentiments d'injustice liés aux jeux de société. Au-delà des crises de larmes et des rires machiavéliques qu’ils peuvent déclencher, ceux-ci cachent en réalité des origines souvent méconnues. Retour sur trois histoires surprenantes derrière des jeux incontournables.
1. Le loup-garou : le jeu inspiré du test de Turing
Une ambiance tamisée et un bon maître du jeu, à la voix angoissante et doucereuse : voilà les éléments d’une partie de loup-garou réussie. C’est en 1986, qu’un professeur de psychologie de l’université de Moscou, Dimitry Davidoff, invente le jeu Mafia, qui plongeait ses joueurs dans une ville dominée par deux mafieux inexorables que devait combattre un chevalier commandant. Alors qu’il visait d’abord à occuper les élèves d’un professeur débordé, le jeu se répand comme une traînée de poudre dans les dortoirs de l’université.
Inspiré du test de Turing, permettant de savoir si une intelligence artificielle peut faire illusion et passer pour un humain, son but est de démasquer les mafieux cachés parmi les villageois innocents, qui disparaissent un à un. En 1997, Andrew Plotkin, auteur américain de jeux informatiques, découvre ce jeu et l’adapte en remplaçant les mafieux par des loup-garous, ces créatures mi-humaines mi-louves ayant nourri les légendes d'Europe depuis des siècles. Depuis, le jeu s’est peu à peu répandu partout dans le monde, avec une célèbre adaptation en France : Les Loups-garous de Thiercelieux.
2. Monopoly : une histoire réécrite par un usurpateur
En 1904, la conceptrice de jeux de société américaine Elizabeth Magie imagine The Landlord’s Games, précurseur du Monopoly, pour dénoncer l'oppression des rentiers de l'immobilier sur les locataires. Rapidement, le jeu se diffuse dans les milieux intellectuels de gauche. Découvrant ce jeu, l’ingénieur Charles Darrow le modifie très légèrement et tente de le vendre à la société Parker Brothers comme son idée propre en 1934.
Naît alors toute une légende autour du Monopoly, qui masquera entièrement l’ingéniosité de sa réelle fondatrice. En 1935, la société de jeux réalise que Charles Darrow n’est pas le seul fondateur, et rachète les droits du jeu à Elizabeth Magie. Malgré ce rachat, la société continue d’alimenter la légende selon laquelle l’usurpateur aurait créé le jeu, croyance qui subsistera jusqu’au XXIe siècle.
3. Cluedo : l’escape game des Années Folles
Dans l’Angleterre des Années Folles, le pianiste Anthony E. Pratt gagne sa vie grâce à des concerts donnés dans des hôtels de campagne. Lors d’une soirée, outre son animation musicale, les convives s’amusent d’un jeu de rôle à taille humaine : un meurtre a eu lieu, et hôtes et acteurs incarnent des personnages, tous suspects. Comme un escape game avant l’heure, les clients de l’hôtel sont alors chargés de démasquer l’assassin.
Quelques années plus tard, en pleine Seconde Guerre mondiale, Anthony et sa femme Elva commencent à concevoir le célèbre jeu de société en s'inspirant de cette expérience. Originellement baptisé “Murder!”, le jeu est vendu par le couple deux ans plus tard en 1945, à la compagnie Waddingtons, qui après quelques modifications le commercialise sous le nom aujourd'hui bien connu de “Cluedo”.