29 nov 2022

Drôle mais inégal, que vaut “Fumer fait tousser”, le nouveau Quentin Dupieux ?

Dans Fumer fait tousser, en salle le 30 décembre, Quentin Dupieux transforme Gilles Lellouche, Anaïs Demoustier, Vincent Lacoste, Jean-Pascal Zadi et Oulaya Amamra en Power Rangers de pacotille. Mais cet énième ovni, pensé comme un recueil de fables, nous emmène partout et nulle part à la fois…

Adèle Exarchopoulos Doria Tillier, Vincent Lacoste au casting de Fumer fait tousser

 

Sortir de la projection d’un film de Quentin Dupieux c’est accepter d’être totalement décontenancé. On ne conseillerait pas l’œuvre à n’importe qui…Pourtant on a vraiment ri. Celui qui œuvre sous le pseudonyme de Mr Oizo dans le monde de la musique électronique a fait des scènes loufoques sa marque de fabrique. Et ses films jouissifs, parfois cruels, voire sadiques mais jamais obscènes laissent souvent les spectateurs sur leur faim. L’humour féroce de Quentin Dupieux tient surtout à un équilibre précaire : le cinéaste ne cache jamais l’amour qu’il porte à ses héros désabusés, des débiles adorables ou des fous furieux attachants qui philosophent toujours comme des starlettes démodées.

 

Dans Fumer fait tousser, en salle le 30 décembre, Quentin Dupieux ne change pas de registre. On suit la Tabac Force, équipe de cinq justiciers – ersatz burlesque des Power Rangers – envoyés en pleine forêt par une marionnette hideuse (leur patron) pour quelques jours de team building. Mais au même moment, l’empereur intergalactique Lézardin (Benoît Poelvoorde) envisage de détruire la planète, menant toute la civilisation vers une fin inexorable… Ce synopsis improbable résume parfaitement le nouveau délire cinématographique du réalisateur, un énième ovni perdu cette fois entre la propagande anti-tabac loufoque et la parodie joyeusement ridicule. Pensé comme un recueil de fables façon Contes de la crypte, série télévisée américaine du début des années 90, Fumer fait tousser mise sur l’humour inégalable de son auteur, entre Les Nuls et Les Monty Pythons et – surtout – sur son incroyable casting. On croise ainsi Gilles Lellouche, Anaïs Demoustier, Vincent Lacoste, Jean-Pascal Zadi et Oulaya Amamra en combinaisons bleu électrique moulantes, Alain Chabat en chef d’équipe mais aussi David Marsais, Adèle Exarchopoulos, Grégoire Ludig, Doria Tillier, Jérôme Niel ou Blanche Gardin dans divers interludes gores et jubilatoires, sortes de pastilles horrifiques sans aucun rapport avec le récit d’origine. Et c’est peut-être là que le bât blesse : Fumer fait tousser, aussi récréatif soit-il, nous emmène partout et nulle part à la fois. Le film inégal multiplie les séquences – dont certaines resteront cultes – sans jamais convaincre le spectateur qu’il n’a plus rien à chercher. Au lieu de cela, il reste interdit, dans l’attente de résolutions qui n’arriveront jamais. Il faut donc aborder Fumer fait tousser comme une suite de sketchs sans prétention, Quentin Dupieux semble se plaire à transcrire l’ère YouTube au cinéma.

Quentin Dupieux, le réalisateur de comédies loufoques

 

Après s’être fait un nom dans le cinéma indépendant en bouleversant la Semaine de la critique du Festival de Cannes en 2010 avec Rubber, l’histoire d’un pneu serial killer, Quentin Dupieux, autrefois installé en Californie, a retrouvé l’Hexagone pour tourner des comédies plus grand public. Il a convaincu Benoît Poelvoorde (Au Poste!, 2018), Jean Dujardin et Adèle Haenel (Le Daim ,2019) de se joindre à ses délires. Sa mise en scène et son sens du montage séduisent autant la critique que le public le succès est au rendez-vous. Dupieux fait du Dupieux. D’autant que le cinéaste enchaîne à une vitesse folle : il souhaite désormais s’attaquer au maître du surréalisme, Salvador Dalì, et entame déjà le tournage de son douzième film… Daaaaaali !. Le long-métrage – dont le budget avoisine les 7 millions d’euros – racontera les multiples rencontres entre une journaliste française et Salvador Dalí dans le cadre d’un projet de documentaire. Au casting : Anaïs Demoustier, Edouard Baer, Gilles Lellouche, Pio Marmaï, Pierre Niney, Alain Chabat, Jonathan Cohen… Ce projet étonnant confirme les liens étroits existant entre le peintre, écrivain et scénariste catalan d’origine espagnole et le cinéma. Salvador Dalí a collaboré avec Luis Buñuel à la réalisation des films cultes Un Chien andalou (1929) et L’Âge d’or (1930). Il a également travaillé avec Alfred Hitchcock et participé à de nombreux films expérimentaux signés Jonas Mekas ou Andy Warhol.