5 projets loufoques de cinéastes : Odorama, film à voir dans cent ans…
Bien loin des blockbusters formatés, les salles obscures offrent parfois des expériences de cinéma plus étranges et osées, du long-métrage en odorama de John Waters au prochain film de John Malkovich, à voir en 2115. Numéro revient sur cinq projets atypiques.
par Nathan Merchadier.
En 2009, la sortie du film Avatar de James Cameron bousculait les codes traditionnels du cinéma en France. Il s’agissait de l’un des premier projets tournés de manière numérique (et non sur pellicule) à effectuer une sortie dédiée au grand public en 3D. Le long-métrage mettant en scène les Na’vi (ces fameux personnages à moitié humain et teintés de bleu) est perçu comme l’acte de naissance d’une nouvelle ère du cinéma. Quelques années plus tard, la plateforme Netflix diffusait un épisode spin-off de la série à succès Black Mirror intitulé Bandersnatch (2018). Il avait pour spécificité d’être dicté par les choix du spectateur qui choisissait à intervalles réguliers les actions du personnage principal. Cette interactivité troublante questionnait alors les frontières du genre cinématographique, offrant la possibilité à n’importe quel spectateur d’écrire à sa manière la suite d’un scénario. D’autres films et séries ont également expérimenté de nouvelles idées pour mieux surprendre les cinéphiles. Du film 100 years qui devrait sortir en l’an 2115 au long-métrage Polyester (1981) de John Waters qui invitait ses spectateurs à une expérience multi-sensorielle mobilisant notamment le sens de l’odorat, retour sur 5 projets loufoques qui ont marqué l’histoire du cinéma.
1. 100 Years (2115) : le film que vous ne verrez jamais avec John Malkovich
En 2015, l’acteur John Malkovich et le réalisateur Robert Rodriguez imaginent le scénario d’un film un peu particulier. Intitulé 100 Years, en référence à sa date de sortie dans les salles de cinéma un siècle plus tard, le film (destiné à faire la promotion d’un cognac de luxe de la maison Rémy Martin) se veut audacieux et mystérieux. Et pour cause, le fameux spiritueux, composé de 1200 eaux-de-vie différentes doit-être consommé 100 ans après sa mise en bouteille pour révéler toute sa saveur. Mais alors comment prévoir la sortie d’un tel film ? Le directeur exécutif de la marque précisait à l’époque que l’unique copie du long-métrage se trouve dans un coffre-fort situé au sein du siège de la marque de Rémy Martin et qu’il ne s’ouvrira qu’en 2115. Simple opération marketing ou véritable questionnement de la temporalité dans le monde du cinéma ? Nos successeurs sur terre seront probablement les seuls à connaître la réponse.
2. I’m Still Here (2011) : le documentaire sur la (fausse) descente aux enfers de Joaquin Phoenix
S’il est connu pour son rôle de braqueur de casino aux côtés de George Clooney, Brad Pitt ou encore Matt Damon dans les films de la saga Ocean’s Eleven (2001), Casey Affleck (le frère de Ben Affleck) l’est beaucoup moins pour avoir réalisé un long-métrage. Pourtant, en 2011, il dévoile un faux documentaire basé sur la (fausse) vie de son (vrai) beau-frère, l’acteur Joaquin Phoenix. Dans cette fiction, l’acteur – qui crève l’écran dans le film Joker (2019) – annonce qu’il prend sa retraite (dans le cinéma) pour se lancer en tant que rappeur. La nouvelle ne manque pas d’émouvoir Hollywood et le plonge au cœur d’une tempête médiatique. En mobilisant un genre cinématographique proche du reportage, Casey Affleck et Joaquin Phoenix livrent un film sur lequel ils n’étaient pas forcément attendus et qui pousse à la réflexion sur ce qui est vrai ou faux.
3. Exit la 3D, dans le film Polyester (1981), le cinéma convoque le sens de l’odorat
Des odeurs de pizza, de colle, de marijuana, ou encore de déodorant pour WC en pleine séance de cinéma ? C’est le pari fou auquel se livre le réalisateur américain John Waters en mobilisant la technique de l’odorama pour accompagner la diffusion en salle de son film Polyester en 1981. À l’aide de cartes à cases numérotées, distribuées avant la projection, les spectateurs pouvaient sentir les scènes du film en grattant les différentes pastilles. Côté scénario, il s’agit d’une comédie à l’humour morbide retraçant les mésaventures d’une mère de famille dans la ville de Baltimore.
4. La faille spatio-temporelle du film Boyhood (2014)
Le film qui a remporté l’Ours d’argent du meilleur réalisateur au festival international de Berlin en 2014 présentait des méthodes de tournage très spéciales… Dans Boyhood, Richard Linklater s’intéresse à la période charnière allant de l’enfance à l’adolescence d’un jeune garçon élevé par des parents divorcés. Afin de retranscrire au mieux les évolutions de ses personnages, il prend le parti de filmer un même casting, porté par l’acteur Ellar Coltrane (ainsi que par Patricia Arquette et Ethan Hawke), douze jours par an sur une période de douze ans. Tourné par intermittence de 2002 à 2013, Boyhood réussit à documenter au mieux les transformations physiques et mentales de ses héros.
5. Le projet fleuve de La Flor (2019) par Mariano Llinás
Si vous aviez trouvé très long le dernier film de Damien Chazelle, Babylon, vous n’auriez probablement pas eu le courage de découvrir dans son entièreté le (très) long-métrage de Mariano Llinás intitulé La Flor (2019). Pour cause, le film-monstre avait été tourné sur près de dix ans, et avait fait parler de lui pour sa durée record de quatorze heures (13h34 précisément). Présenté dans les salles de cinéma au travers de six épisodes, le film avait tout de même réussi à convaincre plus de 30 000 spectateurs en France et s’était attiré les critiques positives de la part de la presse. Véritable ode au cinéma, les six épisodes déroulaient des histoires différentes avec pour seul point commun de rassembler les quatre même actrices.