3 raisons d’aller voir May December avec Natalie Portman et Julianne Moore
En salle ce mercredi 24 janvier 2024, le nouveau film de Todd Haynes, May December, plonge les actrices Julianne Moore et Natalie Portman dans un océan de vices, de frustrations et de confusions, dont aucun spectateur ne ressort indemne.
par Camille Bois-Martin.
1. Un duo d’actrices envoûtant formé par Julianne Moore et Natalie Portman
Sur l’affiche de May December, leurs visages se fondent déjà en un seul : à la fois antagonistes et complémentaires, Natalie Portman et Julianne Moore captivent la caméra de Todd Haynes, qui ne filme presque aucune scène sans que l’une d’elles ne soit présente. Dans le rôle d’Elizabeth Berry, une actrice venue étudier la femme qui a inspiré son futur film, Natalie Portman introduit le spectateur à Julianne Moore, qui interprète Gracie Atherton-Yoo. Cette dernière est une ancienne professeure condamnée à de la prison quinze ans plus tôt pour avoir eu des relations sexuelles avec l’un de ses élèves alors âgé de 13 ans, Joe Yoo (interprété à l’âge adulte par un Charles Melton métamorphosé et stupéfiant), depuis devenu son mari et le père de ses trois enfants.
Étudiant les moindres faits et gestes du personnage incarné par Julianne Moore, Natalie Portman en reprend les expressions et la physionomie – au point de lui ressembler presque totalement, habillée et maquillée comme elle, adoptant la même allure et les mêmes expressions (sourcils froncés, moue boudeuse). Plongée dans le quotidien de Gracie pour peaufiner son rôle, Elizabeth en explore les méandres psychologiques et étudie chacune de ses réactions à un mensonge, à une question ou à une simple action. Et elle s’aventure aux frontières de la bienséance, semblant presque s’identifier finalement à son histoire sordide et polémique…
2. L’intrigue déroutante du film May December
Portée du début à la fin par Julianne Moore et Natalie Portman, l’intrigue de ce nouveau film signé Todd Haynes déroute par son traitement. Si l’histoire que le réalisateur choisit de relater est amorale (inspirée de l’histoire bien réelle de Mary Kay Letourneau et Vili Fualaau), l’angle par lequel le réalisateur choisit de la traiter n’est pas si catégorique. Certes, le spectateur découvre les tenants et les aboutissants du récit à travers le regard policé et moralisateur d’Elizabeth (Natalie Portman), mais Todd Haynes transforme cette dernière en manipulatrice qui use de tous les moyens pour parvenir à ses fins et obtenir toutes les informations possibles autour de l’affaire, au gré de conversations et de rendez-vous dérangeants.
Là se trouve tout le cœur du film, qui ne s’intéresse plus tellement à ce fait de société qui a marqué les années 90 mais aux conséquences de ce dernier au sein du quotidien des personnages, même quinze ans plus tard. Perturbé par Elizabeth et par ses actions, le spectateur se raccroche alors contre toute attente à Gracie et Joe, se trouvant dans une positon difficile. On ne peut en effet pas se fier ni se prendre totalement d’affection pour ces personnages ambivalents. Un récit pour le moins déroutant donc, ponctué de scènes perturbantes où les adultes réagissent de la même manière que des enfants colériques, éclatant en larmes, se recroquevillant… et provoquant chez le spectateur plus de gêne que de pitié.
3. L’univers sordide du réalisateur Todd Haynes
De son duo d’actrices envoûtant à son intrigue déroutante, le film May December immerge ainsi le spectateur dans un univers sordide, façonné par les compositions musicales et la photographie étranges. Sa bande originale, imaginée par le compositeur brésilien Marcelo Zarvos, qui réécrit pour l’occasion le célèbre morceau de Michel Legrand imaginé pour le film Le Messager de 1971, est rythmé de notes de piano perçantes totalement angoissantes.
En particulier lorsque celles-ci marquent le début ou la fin d’une scène révélatrice ou encore la transition entre plusieurs révélations qui viennent perturber la trame du récit. Une atmosphère musicale que le réalisateur Todd Haynes couple avec de gros plans sur les visages de Natalie Portman, de Julianne Moore ou de Charles Melton, accentuant l’effet dramatique de chaque scène. Autre détail captivant : les jeux de lumières, solaires ou artificielles, contrastent avec l’intrigue sombre du film pour créer un tableau hypnotique.
May December (2024) de Todd Haynes, avec Natalie Portman, Julianne Moore et Charles Melton, actuellement au cinéma.