À Saint-Eustache, Rubis Mécenat dévoile un diptyque monumental
Jusqu’au 12 décembre, l’artiste algérien Dhewadi Hadjab expose deux toiles monumentales au sein de l’église Saint-Eustache située dans le 1er arrondissement de Paris. Parmi les descentes de croix et les vierges à l’enfant, ses peintures contemporaines ultra-réalistes – nourries d’une fascination pour la danse et la performance – s’intègrent à l’atmosphère métaphysique de l’édifice par de subtiles références au mobilier liturgique.
Par Mathilde Cassan.
Repéré par le jury de CRUSH, un nouveau programme dédié aux étudiants des Beaux-Arts de Paris, le travail de Dhewadi Hadjab est exposé en compagnie d’une quarantaine d’élèves de l’école lors d’une exposition en février dernier. L’inquiétante étrangeté de ses peintures lui a valu d’être choisi parmi la quarantaine d’étudiants sélectionnés pour inaugurer la nouvelle aide de Rubis Mécénat destinée à la professionnalisation des jeunes artistes. Crée en 2011, le fond de dotation soutient la création contemporaine à l’international en développant des initiatives artistiques et sociales et en implantant des programmes éducatifs. Parallèlement Rubis Mécénat accompagne des artistes par le biais de commandes d’œuvres en association avec des instituions culturelles. Grâce au programme de mécénat, l’église accueillait déjà, depuis 2012, une installation in situ d’un étudiant des Beaux-Arts de Paris. À l’occasion de son dixième anniversaire, Rubis Mécénat lance un nouveau programme de soutien en partenariat avec les Beaux-Arts de Paris et l’église Saint-Eustache. Lauréat de cette première édition, Dhewadi Hadjab a bénéficié d’une bourse de dotation de 5000 €, une aide à la production de 20 000 € afin de réaliser cette exposition à Saint-Eustache grâce à l’accompagnement du critique d’art Gaël Charbau dont il est le commissaire. Le peintre succède ainsi à la longue liste d’artistes qui sont intervenus dans l’église tels que Christian Boltanksi et Bill Viola.
À l’église Saint-Eustache, près des Halles, l’artiste algérien Dhewadi Hadjab déploie deux toiles gigantesques aussi audacieuses qu’énigmatiques. S’élevant sur trois mètres de hauteur, son diptyque ultra-réaliste est suspendu au centre de l’édifice religieux, tel un majestueux pendant contemporain à l’architecture gothique de l’église. Chacune des toiles représente une jeune femme renversée dont le corps, convulsé, tente de maintenir son équilibre sur un prie-dieu vacillant. Elles portent un jogging rouge vif à bandes réfléchissantes, et leur visage est dissimulé aux yeux des visiteurs. Employant la technique du clair-obscur, l’artiste joue avec des contrastes. Sur des fonds d’un noir profond, les corps contorsionnés sont mis en relief par la concentration de lumière qui les baigne. Magnétique, ce diptyque s’inspire du mobilier liturgique comme de l’atmosphère métaphysique de l’édifice religieux.
Suspendues des deux côtés du banc d’œuvre (banc de l’église autrefois réservé aux notables de la paroisse), les deux toiles s’intègrent à l’espace sacré en multipliant subtilement les références à l’espace. Reproduisant sur ses deux tableaux le dallage clair de l’église, l’artiste y met aussi en scène ombres présentes dans la nef, parvenant, par son traitement de la lumière, à créer un tel effet de profondeur, que ses toiles en deux dimensions semblent quasiment accéder à la 3D – se fondre dans l’espace physique de l’église – tant leur réalisme est saisissant. Parmi les descentes de croix et les vierges à l’enfant, ces corps féminins contraints semblent si réels qu’ils en deviennent troublants. Si la peinture de Dhewadi Hadjab semble en apparence académique et d’un extrême classicisme, elle est en réalité nourrie, dans sa phase préliminaire, par la photographie. Plaçant ses modèles dans des positions d’extrême inconfort, l’artiste capture d’abord en photo chaque détail de leurs postures acrobatiques. À partir de ces clichés, l’artiste réalise ensuite des photomontages afin de créer des postures fictionnelles – au-delà des limites du corps humain.
Pina Bausch rencontrant le Caravage… À la fois classique et contemporaine, la peinture de Dhewadi Hadjab se nourrit avant tout d’une fascination pour la danse et la performance. Né initialement de son amitié avec une danseuse, cet attrait s’est enrichi, au fil des années, des recherches approfondies qu’a réalisées l’artiste sur la danse contemporaine, notamment sur le travail de la chorégraphe allemande Pina Bausch. “La danse a toujours été pour moi un terrain de curiosité. Mais dans la danse, c’est ce moment d’échec qui m’intéresse, l’instant où la pose se défait, où la posture est cassée, où le corps tremble en cherchant le bon geste”, explique le jeune peintre né en 1992 à M’sila en Algérie. Alors qu’il étudiait aux beaux-arts d’Alger, le peintre ne rêvait que de venir étudier en France. Afin de payer ses cours de français, il réalisait des copies de célèbres tableaux orientalistes. Après un passage aux beaux-arts de Bourges dont il est diplômé en 2019, Dhewadi Hadjab étudie désormais aux Beaux-Arts de Paris au sein de l’atelier du peintre Tim Eitel. L’exécution minutieuse et le raffinement dont témoignent ses toiles résultent d’un lent apprentissage de la peinture classique comme d’une remarquable proximité avec l’univers de la danse et de la performance dont sa peinture exprime les mouvements à la perfection. Deux toiles du peintre – baptisée Dream Dancing et Posture du corps IV – sont actuellement accrochées au sein de l’exposition “Danser sur un volcan” au FRAC Franche-Conté aux côtés de Trisha Brown et Pipilotti Rist.
Repéré en février dernier lors de la première édition du programme Crush initié par les Beaux-Arts de Paris, Dhewadi Hadjab a été sélectionné, parmi une quarantaine de candidats, pour inaugurer la nouvelle aide de Rubis Mécénat. Créé en 2011, ce fonds de dotation soutient la création contemporaine à travers le monde grâce à ses initiatives artistiques et sociales ainsi que ses programmes éducatifs. En parallèle, Rubis Mécénat propose régulièrement à de jeunes artistes d’investir des lieux atypiques tels que le Collège des Bernardins ou le Palais de la Porte Dorée à Paris afin d’y réaliser une installation in situ. Si l’église Saint-Eustache, accueillait déjà chaque année, depuis 2012, une œuvre réalisée par un étudiant des Beaux-Arts de Paris, le fonds culturel lance cette année un nouveau programme de soutien en partenariat avec les Beaux-Arts de Paris. Lauréat de cette première édition, Dhewadi Hadjab a bénéficié d’une bourse de dotation de 5000 €, une aide à la production de 20 000 € afin de réaliser cette exposition à Saint-Eustache grâce à l’accompagnement du critique d’art Gaël Charbau qui en est le commissaire. Le peintre succède ainsi à la longue liste d’artistes qui sont intervenus, avant lui, au sein du prestigieux édifice religieux tels que Christian Boltanksi et Bill Viola.
Carte blanche à Dhewadi Hadjab, une commande de Rubis Mécénat en partenariat avec les Beaux-Arts de Paris, jusqu’au 12 décembre à l’Église Saint-Eustache, Paris Ier.