Rencontre avec Dua Lipa, superstar très humaine de la pop et égérie parfum pour Yves Saint Laurent
Chanteuse talentueuse, icône de mode pointue, idole de la génération Z, artiste engagée et féministe, ambassadrice d’honneur du Kosovo… l’auteure-compositrice-interprète anglaise d’origine albanaise Dua Lipa est devenue en quelques années l’une des superstars de la pop les plus attachantes et en phase de son époque. Alors qu’elle est l’égérie de Libre, le nouveau parfum d’Yves Saint Laurent, rencontre avec une artiste dont l’indépendance et l’humanité nous passionnent autant que ses tubes, à la fois ultra dansants et très émotionnels.
propos recueillis par Violaine Schütz.
Sur Instagram, où elle est suivie par plus de 86 millions de followers, Dua Lipa n’est pas une star comme les autres. Humble, chaleureuse, souriante, spontanée, authentique, elle incarne, non pas la déesse intouchable sur un piédestal pailleté, mais la figure, rassurante et attachante, de la meilleure amie ou de la grande soeur. On peut voir sur des clichés colorés l’auteure-compositrice-interprète anglaise d’origine albanaise (du Kosovo) âgée de 27 ans, souffler des bougies sur un gâteau d’anniversaire, boire du vin nature en prononçant quelques mots en français, chiner aux Puces de Saint-Ouen ou danser à un mariage comme si les lendemains n’existaient pas. Une façon immersive et décomplexée de partager avec le monde un quotidien complètement en phase avec les habitudes et les aspirations de la génération Z, dont l’artiste est devenue l’idole.
Mais il ne faut pas s’y tromper. La Britannique incandescente et sexy est en réalité l’une des plus grandes artistes pop du moment, dans la lignée de Rihanna, Beyoncé ou Lady Gaga. Avec sa voix rauque puissante et sa musique rétro-futuriste fédératrice (qui mêle disco, funk et électro), elle a réussi à s’attirer les louanges de la critique et l’amour du public. Son prénom signifie d’ailleurs « amour » en albanais. Récompensée par plusieurs Grammy et Brit Awards, celle qui a commencé en postant des reprises impressionnantes sur YouTube collectionne les collaborations prestigieuses (Elton John, Megan Thee Stallion, Gwen Stefani, Madonna, Miley Cyrus, Kylie Minogue, Angèle) et les tubes (New Rules, Fever, Physical) cumulant des milliards d’écoutes en streaming. Son deuxième album, l’hédoniste et lumineux Future Nostalgia (2020) a servi de remède à la mélancolie des confinements, chassant les angoisses engendrées par la pandémie à grand rythmes d’hymnes pop influencés par l’ère du disco.
Mais alors que beaucoup d’artistes de cette envergure s’enferment dans leur tour d’ivoire, cette fille d’immigrés kosovars (un père chanteur dans un groupe de rock, à la tête d’une agence de communication, et une mère agente de voyages) est restée profondément humaine et connectée au monde qui l’entoure comme le montrent ses combats (notamment envers la communauté LGBT et pro féministes). La star a créé l’association caritative Sunny Hill Foundation, du nom du quartier de Pristina, où ses parents ont grandi, pour aider les jeunes kosovars à développer des projets artistiques. Toujours dans une démarche de proximité bienveillante, elle est à l’initiative d’une newsletter, Service95, et d’un podcast, bien nommé At Your Service, tout deux lancés cette année.
Celle qui a été nommée ambassadrice d’honneur du Kosovo y interviewe des personnalités comme Amal Clooney, Olivier Rousteing, la défenseure des droits de l’homme et Prix Nobel Nadia Murad ou encore l’acteur et activiste britannique d’origine pakistanaise Riz Ahmed. Aussi puissante qu’engagée, l’icône de la pop avait tout pour devenir égérie d’une essence qui s’appelle Libre, le parfum. Ce nouveau jus floral et sensuel signé Yves Saint Laurent, a été pensé comme un pont entre la France et le Maroc, un pays cher à Yves Saint Laurent, le couturier. Ce grand créateur avait pour habitude de dire : « Sans élégance de cœur il n’y a pas d’élégance. » Il aurait sans doute beaucoup aimé la muse et artiste généreuse et passionnée que l’on a rencontrée pour parler de musique, de beauté et de mode.
Numéro : Vous êtes égérie de Libre, le nouveau parfum d’Yves Saint Laurent. Que représentent le label de parfums Yves Saint Laurent et la maison de mode Saint Laurent pour vous ?
Dua Lipa : C’est un honneur pour moi de faire partie de cette campagne et de la famille Yves Saint Laurent/Saint Laurent. Je suis très attachée à ce que cette grande maison signifie pour les femmes. Elle a tissé un lien puissant entre la force et l’empowerment féminins et a donné aux femmes l’opportunité de se sentir fortes et sexy. Je pense à ce qu’a fait Yves Saint Laurent avec le smoking, puis les costumes. Il était le premier, dans les années 60, à en imaginer un pour les femmes. C’est un héritage immense. Et le parfum Libre incarne cet esprit-là. Les mêmes messages d’empowerment résonnent à travers la nouvelle campagne et l’univers du parfum. On se sent puissantes en le portant.
Vous portez vous-même un costume dans certaines des images de la campagne Libre. Est-ce que c’est le mélange de féminin et de masculin qui vous séduit chez Yves Saint Laurent et Saint Laurent ?
Oui, je suis très impressionnée par cette silhouette iconique de la femme en costume imaginée au départ par Yves Saint Laurent parce qu’elle juxtapose les deux genres, ce que je trouve très fort. Elle correspond à ma propre définition du style, de ce que je trouve beau.
Le nom du parfum est Libre. Et vous reprenez la chanson Freedom! ’90 (1990) de George Michael dans la campagne vidéo de ce nouveau jus. Quelle est votre définition de la liberté ?
La possibilité, pour une femme, de faire les choses selon ses propres conditions. Les femmes prennent de plus en plus le contrôle sur leurs vies et on a beaucoup plus d’espace pour être nous-mêmes, celles que l’on veut vraiment être et exploiter pleinement notre potentiel. Mais il y a encore beaucoup de travail à effectuer vers la liberté.
Quels rôles jouent la mode et la beauté dans votre univers musical ?
Je pense que la façon dont on se présente au monde est essentielle. Lors de mes concerts, par exemple, j’accorde beaucoup d’importance au visuel, notamment aux changements de costumes. Cela compte autant que les chorégraphies, la lumière et les images qui sont projetées sur les écrans géants et la performance en elle-même. Mais le plus essentiel pour moi est de faire des choses qui ont une utilité et d’évoquer dans mes chansons des sujets qui peuvent trouver un écho chez d’autres personnes et les aider d’une certaine manière.
Quelle est votre définition personnelle de la beauté ?
Ce que je trouve beau, ce sont les choses uniques, qui peuvent être un peu excentriques. Chacun a ses particularités qui le rendent différent et spécial. Il faut brandir et défendre ses spécificités car c’est ce qui nous rend beau.
Vous êtes actuellement en tournée pour défendre votre second album, Future Nostalgia, sorti en 2020. Vos concerts ressemblent à d’immenses fêtes où tout le monde communie sous une boule à facettes géante, comme aux grandes heures du disco. Comme parvenez-vous à déployer une telle énergie en enchaînant les tubes et les chorégraphies ?
C’est très important pour moi d’être très consciencieuse et précautionneuse envers ma santé. Pendant les shows, je ne m’arrête pas une minute. Je cours pendant plus d’une heure et demie, change de tenue, danse, chante… Je fais du yoga tous les jours pour développer ma force (physique et mentale), mon endurance et me déconnecter de tout le reste pendant une heure. Ça permet de mieux m’ancrer dans le moment présent. Je médite et j’essaie d’avoir un mode de vie le plus sain possible et de dormir tant que je le peux. Mais sur scène, ce qui me porte le plus c’est l’énergie dégagée par le public. L’adrénaline est un ingrédient très puissant.
Future Nostalgia mixait plusieurs genres musicaux (électro, pop, funk, disco), plusieurs espace-temps (le passé – les années 80 – et le futur) mais aussi plusieurs types de sentiments. On passe de l’euphorie à l’envie de danser à la mélancolie.
C’est ce qu’essaie de transmettre depuis mes débuts dans la musique : cette sensation que je qualifie de « dance crying » (danser en pleurant, ndr). Tout ce qui est de l’ordre des juxtapositions et des jeux entre les mondes me touche, que ce soit dans la mode ou dans la musique. Je trouve la dualité plus fun et passionnante que ce qui est unidimensionnel.
Vous avez lancé une newsletter, Service95, dans laquelle vous partagez de bonnes adresses mais aussi des recommandations de livres féministes ou des articles plus sociétaux. Vous animez aussi un podcast, At Your Service, dans lequel vous interviewez notamment des activistes…
Depuis des années, je rédige des listes de différentes choses qui me plaisent. Des endroits à visiter, des lieux où dormir, des restaurants à tester, des articles à partager à mes amis. Toutes mes notes sur mon téléphone sont pleines de ces listes et de playlists. C’est une véritable obsession (rires). J’ai alors pensé à une newsletter qui pourrait tout réunir. J’aime le fait que la newsletter arrive, comme un service de conciergerie, directement dans les boîtes mail, sans qu’on doive chercher les informations un peu partout. C’est un mélange de centres d’intérêts très différents qui font qui je suis. J’ai beaucoup de passions et je voulais tout encapsuler dans un seul format. J’essaie d’être vraiment attentive à la curation pour que tout ce que les newsletters comprennent aient du sens et un intérêt. J’espère que cela intéressera de plus en plus de monde et que cela grandira.
Quel artiste musical nous recommanderiez-vous ?
L’auteure-compositrice-interprète britannique soul Cleo Sol qui a une voix fantastique. En plus de sa carrière en solo, elle fait partie du collectif anglais Sault (un projet R’n’B-soul-jazz mystérieux qui n’a donné aucune interview, ni aucun concert et dont l’un des albums n’a été disponible que pendant 99 jours, ndlr).
Vous avez enregistré des morceaux avec de nombreux artistes tels qu’Elton John, Calvin Harris ou Megan Thee Stallion. Comment choisissez-vous vos collaborations ?
J’aime travailler avec des personnes que j’apprécie musicalement parlant et avec lesquelles on ne s’attend pas à ce que je collabore. J’aime surprendre et expérimenter de nouvelles choses.
Future Nostalgia (2020) de Dua Lipa, chez Warner Records. Libre, le parfum, Yves Saint Laurent, disponible le 12 septembre 2022.