15 oct 2021

Qui est Elodie Gervaise, la chanteuse berlinoise qui réinvente la house en français ?

Après un premier EP prometteur, Syzygy, publié en 2021, la chanteuse franco-australienne exilée à Berlin Elodie Gervaise s’impose comme la nouvelle étoile d’une pop synthétique séduisante et d’une house envoûtante. Rencontre avec une artiste de 30 ans à qui l’avenir appartient.

Ces dernières années, on a vu beaucoup d’esthétiques fortes des années 90 et 2000 revenir dans la pop culture à l’image de mouvances rave, gabber, riot grrls et cyber-punk. En France, ce sont des artistes comme Joanna, Ascendant Vierge et Régina Demina qui s’inscrivent dans un revival gothique mâtiné d’électronique. Aux États-Unis, ce sont Willow Smith, Olivia Rodrigo ou Halsey qui donnent de nouvelles couleurs à l’emo, ce punk pour adolescents caractérisé par ses paroles axées sur l’expression de soi qui a émergé dans les années 1980 et dominé la décennie suivante. 

 

Elodie Gervaise, étoile montante de la pop synthétique et de la house

 

Les mélodies du premier EP (sorti en 2021) de la chanteuse franco-australienne exilée à Berlin et âgée de 30 ans Elodie Gervaise et son univers pictural ne détonnent pas dans cette tendance à vouloir réviser ses basiques en beauté. Dans le clip de son nouveau single, IMYG (I’M Your Guy), l’artiste déambule en combinaison de latex noire qui rappelle la saga cyberpunk culte Matrix. Un univers SF et sombre qui sied bien au mysticisme de ses chansons. Dans les photos accompagnant son nouveau titre house, tubesque, hédoniste et chanté en français, Parfaite, produit par le Berlinois originaire d’Afrique du Sud Thor Rixon, elle affiche la panoplie complète de la tendance du revival Y2K, lunettes orangées rectangulaires comprises.

 

Follement ancrée dans son temps, Elodie Gervaise compose des chansons à la guitare et au synthé qui abordent des thématiques très contemporaines. Parmi les titres de son premier EP, Syzygy (2021), elle chante son angoisse face à l’urgence écologique et au manque d’action politique. Dans un autre morceau, Free Babe, elle évoque sans tabou la place que prend la maladie mentale dans une relation amoureuse. La difficulté de créer des liens avec d’autres êtres humains semble passionner la jeune artiste. Le nom de cet EP, Syzygy (« syzygie » en français), signifie une conjonction ou une opposition en astronomie. La syzygie s’emploie en effet notamment pour parler de situation magique où trois objets célestes s’alignent. Cela peut concerner le Soleil, la Terre et la Lune. « Pour moi, cet EP signifie la connexion, universelle et intime, d’humain à humain. Les cartes de tarots et l’astrologie, dont je tire une grande force et que j’utilise comme outils, guident mon pouvoir. Comme un chat, je vis très bien la nuit et j’aime le sentiment de spontanéité qu’elle peut apporter : la surprise des rencontres et des histoires des personnes croisées. »

Elodie Gervaise @ Guillaume Plas

Des influences allant de Sevdaliza et Yseult à Björk

 

Pour Elodie Gervaise, un peu sorcière à ses heures perdues, les planètes semblent enfin se mettre au diapason. L’auteure-compositrice-interprète née sur la Côte Est de l’Australie d’un père français et d’une mère australienne, a formé il y a quelques années deux groupes de rock psychédélique et lo-fi en Australie, Galaxy Girls et Candy Lucid. Elle a aussi été architecte au pays des kangourous avant de déménager à Paris pour étudier la musique. « C’était comme une autre vie. Mais les deux domaines, la musique comme l’architecture, proposent des expériences sensorielles et nous donnent l’espace pour ressentir les choses plus émotionnellement. » 

 

Depuis qu’elle se consacre uniquement à la musique, la question d’espace(s) est primordiale. C’est en effet sa double culture, entre deux terres très éloignées à tout point de vue, qui lui inspirent des chansons à la fois mélancoliques et dansantes. « J’ai grandi avec Leonard Cohen, les Beatles ou encore des artistes français comme Jacques Brel. Par la suite, quand je vivais à Byron Bay, j’ai découvert un univers de force féminine par Big Thief, Warpaint et Mazzy Star ou encore le rock psyché avec The Black Angels et The Brian Jonestown Massacre. Depuis, l’Europe a réveillé en moi une sensibilité à la musique électronique. Aujourd’hui, je dirais que mes inspirations majeures sont des artistes comme Sevdaliza, Yseult et Björk. » La musique d’Elodie Gervaise, qui a récemment repris un titre de Joy Division sur YouTube, évoque pour ses expérimentations et son côté lunaire à la fois l’artiste islandaise qu’elle adule mais aussi la chanteuse suédoise de synthpop Molly Nilsson. De quoi laisser présager le meilleur concernant le futur de la Franco-Australienne, surtout lorsqu’on sait que la chose la plus folle réalisée par l’artiste, c’est d’avoir pris du LSD en montgolfière.

 

Parfaite (2023) de Thor Rixon et Elodie Gervaise, disponible.